Esel – D.1 – III.2 Tierepos

L’épopée animale se devait de faire une place à un sujet si présent dans le quotidien de l’homme médiéval, et le Roman de Renart n’y manque pas. L’âne y est présent, se nomme Bernard, avec rang d’archiprêtre. Un tel statut lui assure aussi bien une fonction de confesseur qu’une place dans les offices et les pèlerinages. C’est ainsi que, se rendant à Rome avec Renart et Belin, il écrase quatre loups en tombant lourdement d’un arbre; mais il s’est blessé et renonce (comme ses compagnons) à aller plus loin. C’est toutefois dans les dernières branches (xxx et xxxi) que Bernard donne pleine mesure de ses talents. Quoique »mout preudons et de pes« (xxx, 2062), il se montre digne émule de Turpin, le prélat guerrier du Roland, quand il vole à la rescousse de Brun (xxx, 2579). Les nombreux méfaits commis par Renart lui valent de recueillir la confession du goupil qui l’a mandé (xxxi, 364). Il le presse de se repentir (xxx, 373) puis, sur ordre royal, chante »vigiles de morz« pour Renart que l’on croit trépassé (xxx, 557); à l’office, c’est »mout dolent« qu’il lit la neuvième leçon (xxxi, 641-2). Après qu’il a fait sonner les cloches (xxxi, 792), il se revêt des ornements liturgiques, se dispose à célébrer l’office funèbre (xxxi, 844 s.) et prononce un sermon qui vire au panégyrique absolu de celui qu’il chapitrait à l’heure de sa confession. Il trouve maintenant des raisons bien peu chrétiennes pour glorifier ses faits les plus luxurieux et se livre à un éloge débridé de la sexualité (xxx, 859-916). Puis il chante la messe après que Ferrant, le cheval de charge, a confirmé l’orthodoxie de ce sermon: »Renart, n’en soit mise en doutance, / En a faite sa penitance./ L’ame en ira a reculons / En paradis o les mulons [mulets], / Illuec ou les asnes iront / Quant de ce siecle partiront.« (xxx, 999-1004)

La branche présentera encore deux autres mentions, plus anodines, du singulier archiprêtre. Au total, malgré l’éclat de cette prouesse oratoire, la présence de l’âne dans la grande épopée animale paraît assez épisodique, même si le Roman de Renart a souligné à sa manière trois traits assez constants de l’âne médiéval: sa puissance vocale, son ardente sexualité et son association avec le christianisme.

Lit.: Le Roman de Renart, éd. M. ROQUES, 1948-63.

Michel Bideaux

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