Esel – B.2 Bibel und Bibelexegese

Le texte biblique reflète bien l’importance de l’espèce dans l’est du bassin méditerranéen: plus de cent trente mentions dans les deux Testaments, selon le Dictionnaire de la Bible de F. Vigouroux. Elles lui sont généralement favorables, et le christianisme héritera de cette bienveillance. Michelet a bien vu l’estime que lui vouaient les siècles médiévaux: »Sobriété, patience, ferme résignation, le Moyen Âge, plus juste que nous, distinguait en l’âne je ne sais combien de vertus chrétiennes.« Mais l’animal doit compter aussi avec d’autres représentations, beaucoup plus négatives, véhiculées par les auteurs grecs et latins, dont le poids s’alourdit à mesure que progresse en occident la connaissance des textes de l’antiquité païenne. Elles tomberont fort à propos pour illustrer le dualisme chrétien, certains traits prêtés à l’âne (stupidité, paresse, appétits grossiers) servant tout naturellement à désigner la matière peccamineuse du corps, tout comme l’Ennemi qui attaque par elle la nature spirituelle de l’âme: c’est ainsi que Jacques de Vitry (XIIIe siècle, exemplum 16), montre en son corps l’âne ingrat qui profite des grâces dispensées par Dieu pour s’en repaître avant de jeter sa monture dans le fossé du péché, puis dans l’enfer.

Saint François d’Assise, à qui est due pourtant l’invention du boeuf et l’âne dans la crèche, n’en désigne pas moins son corps de »frate asino«. Le Glossaire de Du Cange était fondé à noter cette acception: »Asinus: Metaphorice, Corpus humanum pronum ad libidem.«

Mais l’association de l’âne à trois épisodes de la vie de Jésus permettra d’amarrer durablement et fortement l’humilité de l’animal à la nature humaine du Christ: la Nativité, la fuite en Égypte, l’entrée à Jérusalem. La première, à vrai dire, absente des textes canoniques, est tardive, et n’est pas proposée avant l’interprétation allégorique faite d’un texte d’Isaïe par l’évangile apocryphe du Pseudo Matthieu (VIe siècle). Elle amènera, forte du consentement du pape Honorius III, l’institution par saint François (1223) faite de la crèche où l’âne et le boeuf veillent sur l’enfant Jésus. Son immense succès populaire ne doit pas faire oublier l’incertitude des interprétations qu’elle a suscitées.

Michel Bideaux

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